Après trois ans de relations tendues, Emmanuel Macron débarque au Maroc avec une délégation impressionnante et 10 milliards d’euros de contrats en poche. Une visite où chaque geste, chaque mot est calculé pour ressouder des liens historiques, même si les fissures diplomatiques restent bien visibles sous le vernis des accords et sourires de circonstance.
Emmanuel Macron, et sa visite royale au Maroc. Après trois ans de tension glaciale, l’Élysée semble vouloir recoller les morceaux avec un pays qui n’a pas hésité à bouder la France, en raison de désaccords profonds. Ce lundi, le président français et une impressionnante délégation de ministres, chefs d’entreprise et autres personnalités sont arrivés en grande pompe pour un retour en scène diplomatique. Mais que cache donc ce spectacle de poignées de main et de contrats mirobolants ?
Le président français marche sur des œufs
L’accueil est minutieusement orchestré. À la descente de l’avion, c’est le roi Mohammed VI lui-même qui s’avance, appuyé sur sa canne, pour une poignée de main appuyée avec le président français. Le prince héritier Moulay Hassan et le prince Moulay Rachid, frère du roi, complètent cette scène bien soignée. Et, bien sûr, on ne peut pas passer à côté de l’alignement parfait de 22 accords d’investissement, qui cumulent la coquette somme de 10 milliards d’euros. De quoi faire penser que l’argent est le véritable « lubrifiant diplomatique » de ce rapprochement, même si les enjeux vont bien au-delà des chiffres.
Le moment solennel au mausolée de Mohammed V, le premier roi du Maroc post-indépendance, offre à Macron et à son épouse une occasion de témoigner leur respect. Cette étape, au-delà de son caractère symbolique, relève de la diplomatie de politesse, un passage obligé pour montrer à Rabat que Paris n’oublie pas l’histoire partagée. Il est clair que le président français marche sur des œufs, surtout depuis qu’il a admis cet été la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, une question qui, dans ce contexte, a le poids d’une bombe à retardement. Et la communauté internationale, avec en premier lieu l’Algérie, n’a certainement pas terminé d’examiner cette prise de position sous toutes ses coutures.
Les fissures ne se reboucheront pas en un claquement de doigts
Mais il ne faut pas s’y tromper : derrière ce bal diplomatique se cache une opération de relations publiques bien huilée. La France semble prête à débourser pour retrouver la place de choix que lui disputent de plus en plus d’autres puissances, bien conscientes de l’attrait stratégique du Maroc. Des contrats qui ne concernent pas seulement le commerce, mais aussi des secteurs stratégiques que Rabat pourrait très bien négocier avec d’autres partenaires si Paris ne ravivait pas les relations. Ce réchauffement a certes son charme, mais il reste teinté d’intérêt — et le Maroc le sait bien.
Le discours au Parlement en dit long : chaque mot est pesé, chaque regard est scruté, et chaque silence parle. Ce rapprochement est certes agréable en apparence, mais chacun sait bien qu’il est loin de régler les désaccords de fond qui existent entre les deux pays. En filigrane, il semble évident que l’histoire des relations franco-marocaines, autrefois tissée de liens solides, a désormais des fissures qui ne se reboucheront pas en un claquement de doigts.
Pour l’instant, cette visite ressemble davantage à un pacte tacite entre deux puissances qui savent que, malgré leurs différends, il est plus avantageux de faire semblant de s’entendre. Alors, pour Macron et sa délégation, le retour au bercail français se fera peut-être avec des signatures et des sourires satisfaits, mais les défis diplomatiques ne sont pas prêts de disparaître sous les dorures du mausolée de Mohammed V.
Oumarou Fomba
Source : Sahel Tribune
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