Le Conseil national de transition (CNT) du Mali a franchi une étape importante la semaine dernière en adoptant, à l’unanimité, une loi organique modifiant les règles de fonctionnement de la Cour Constitutionnelle. Avec un vote de 131 voix en faveur, cette réforme marque un tournant décisif dans la réorganisation des institutions judiciaires du pays. L’un des changements majeurs de cette nouvelle loi est la redéfinition des prérogatives de la Cour Constitutionnelle, une décision qui devrait avoir un impact profond sur la gestion des élections et sur la crédibilité des processus démocratiques.
Redéfinition des rôles : La fin de la proclamation des résultats électoraux par la Cour Constitutionnelle
Bamada.net-L’une des principales modifications apportées par cette loi est la suppression du rôle de la Cour Constitutionnelle dans la proclamation des résultats définitifs des élections législatives, municipales et sénatoriales. Jusqu’à présent, c’était à cette instance qu’incombait cette responsabilité, mais désormais, cette tâche revient à l’Autorité Indépendante de Gestion des Élections (AIGE). Ce changement s’inscrit dans la volonté de garantir une plus grande indépendance et transparence dans la gestion des élections. L’objectif est de renforcer la confiance des citoyens dans l’intégrité des résultats, en évitant toute suspicion de manipulation ou d’ingérence politique.
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Cela dit, cette réforme ne diminue pas le rôle crucial de la Cour Constitutionnelle dans la gestion de certaines élections. La Cour continuera de proclamer les résultats définitifs des élections présidentielles et des référendums, des scrutins stratégiques pour la stabilité politique du pays. De plus, elle aura toujours compétence pour trancher les contentieux électoraux, mais uniquement dans les circonscriptions concernées par les requêtes.
Un pouvoir élargi en cas de vacance du pouvoir
Un autre aspect important de cette réforme concerne la gestion de la vacance du pouvoir au sommet de l’État. En cas d’incapacité du Président de la République à exercer ses fonctions, la Cour Constitutionnelle sera désormais habilitée à se prononcer sur la vacance du poste, après une saisine des principales autorités politiques du pays, à savoir le président de l’Assemblée nationale, le Premier ministre et le président du Sénat. Ce mécanisme vise à garantir la stabilité institutionnelle et éviter toute vacance prolongée du pouvoir exécutif, une situation qui pourrait fragiliser l’ensemble de l’édifice politique du pays.
Un mode de désignation des membres rééquilibré
En plus de la révision des prérogatives de la Cour Constitutionnelle, cette réforme modifie également le mode de désignation des neuf membres de la Cour. Conformément à la Constitution du 22 juillet 2023, les membres de la Cour Constitutionnelle seront désormais choisis par différentes institutions et autorités du pays, afin d’assurer un équilibre entre les pouvoirs et d’éviter toute concentration de pouvoir dans une seule entité.
Ainsi, le Président de la République désignera deux membres, tandis que les présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale en choisiront chacun un. Le Conseil supérieur de la magistrature nommera deux membres, et deux autres seront désignés parmi les enseignants-chercheurs en droit public. Enfin, l’ordre des avocats du Mali pourra nommer un membre. Ce système de désignation pluraliste a pour but d’assurer une représentativité large et une expertise diversifiée au sein de la Cour, renforçant ainsi son impartialité et sa crédibilité.
Une réforme pour restaurer la confiance
Cette réforme intervient dans un contexte où la Cour Constitutionnelle avait été fortement critiquée lors de la proclamation des résultats des élections législatives de 2020, un épisode qui avait contribué à la crise politique ayant abouti à la chute du régime démocratiquement élu. Les manifestations populaires et les revendications de réformes avaient largement porté sur le rôle controversé de la Cour dans ces résultats, mettant en lumière une crise de légitimité des institutions.
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La réforme actuelle vise ainsi à restaurer la confiance des citoyens dans les institutions judiciaires et électorales du pays, en clarifiant le rôle de chaque organe et en réduisant les risques de conflits d’intérêts. Elle cherche à offrir des garanties supplémentaires en matière de transparence et de justice, pour éviter de nouveaux affrontements politiques liés aux résultats électoraux.
Conclusion : Un modèle de gouvernance plus transparent
En réformant la Cour Constitutionnelle, le Mali avance vers un système de gouvernance plus transparent et plus stable. La suppression de certaines prérogatives de la Cour, ainsi que l’introduction de mécanismes pour garantir l’indépendance des élections, sont des avancées notables pour la démocratie malienne. Ces changements devraient permettre de renforcer les institutions, de réduire les tensions politiques liées aux résultats des scrutins, et de promouvoir une gestion plus sereine des affaires publiques.
La réforme de la Cour Constitutionnelle représente ainsi un pas décisif vers la modernisation des institutions maliennes et la consolidation de l’État de droit. Si elle est mise en œuvre de manière rigoureuse et respectueuse des principes de justice, elle pourrait servir de modèle pour d’autres pays de la région, aspirant à une meilleure gouvernance et à des élections plus transparentes.
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Moussa Keita
Source: Bamada.net
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