Alors que le comité de rédaction de l’avant-projet de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale s’emploie à recueillir les avis des différentes composantes du pays, un autre sujet brûlant vient cristalliser l’attention des Maliens : l’instauration du Fonds de soutien aux projets d’infrastructures de base et de développement social. Un mécanisme de prélèvement qui, loin de susciter l’adhésion populaire, a plutôt réveillé de profondes fractures au sein de la société.
Un fonds qui sème la discorde
Bamada.net-Dans un contexte déjà marqué par des défis multiples, la transition a décidé de mettre en place une nouvelle taxation portant sur les services de télécommunication, incluant la téléphonie fixe, mobile, internet, ainsi que les rechargements et abonnements. L’objectif affiché est de financer des infrastructures essentielles et de soutenir le développement social. Pourtant, cette décision a été perçue par une partie de la population comme une contrainte supplémentaire dans un climat économique tendu.
À Lire Aussi : Taxe sur les télécommunications et les transferts mobiles : Au-delà des controverses…
Cette initiative tombe au moment même où le pays s’efforce de tracer un chemin vers la réconciliation et la cohésion nationale. En théorie, la Charte pour la paix et la cohésion nationale ambitionne de bâtir un socle commun autour des valeurs de paix, de justice et de solidarité. Toutefois, paradoxalement, la mise en place du fonds de soutien semble avoir déclenché une vague de mécontentement qui divise les citoyens et alimente un climat de défiance vis-à-vis des autorités.
Un rejet motivé par plusieurs facteurs
Pour nombre de Maliens, cette taxe arrive au pire moment. Entre crise énergétique, difficultés économiques et pression sociale grandissante, beaucoup estiment que l’État leur demande un effort supplémentaire sans réelle contrepartie visible. L’opulence perçue des hautes sphères de l’administration publique contraste fortement avec les sacrifices demandés à la population. Cette situation explique en partie l’hostilité grandissante à l’égard de ce prélèvement.
D’autres voix s’élèvent pour dénoncer le manque de garanties quant à la gestion des fonds collectés. Les différents rapports du Bureau du Vérificateur général ont révélé des détournements massifs de deniers publics, alimentant ainsi la méfiance des citoyens. Malgré les promesses de la transition de combattre ces pratiques, les résultats tardent à se concrétiser. La transparence dans l’allocation des ressources reste donc une attente forte et légitime.
Une fracture sociale grandissante
Au-delà du rejet de la mesure, un clivage de plus en plus visible se dessine entre les Maliens. D’un côté, ceux qui dénoncent une imposition injuste et inopportune, et de l’autre, ceux qui défendent bec et ongles la décision gouvernementale. Malheureusement, au lieu d’un débat constructif, les échanges se sont envenimés, notamment sur les réseaux sociaux où les opposants à la taxe sont parfois traités de « faso den djougou », une expression péjorative visant à discréditer leur position.
À Lire Aussi : Nouvelles taxes sur les télécommunications : AMRTP, connivence entre connivences et intérêts
Mais en quoi contester une mesure prise par les autorités ferait-il d’un citoyen un traître à la nation ? La démocratie implique le droit à la critique et au débat d’idées. Il est donc essentiel que chacun puisse exprimer son opinion sans être victime de stigmatisation ou d’intimidation.
Le défi de la communication et de la transparence
Face à cette levée de boucliers, les autorités de la transition ont un impératif : rétablir la confiance. Cela passe par une communication claire et régulière sur l’usage des fonds collectés et leur impact concret sur le quotidien des Maliens. Les citoyens doivent voir des résultats tangibles, notamment en matière d’amélioration des infrastructures et des services essentiels, à commencer par l’électricité.
Si ces nouvelles taxes doivent être maintenues, elles doivent être justifiées par des actions visibles et bénéfiques pour la population. À défaut, elles risquent de rester perçues comme une charge supplémentaire imposée à un peuple déjà éprouvé.
La balle est donc dans le camp des décideurs. Leur capacité à convaincre et à démontrer l’utilité de ces prélèvements conditionnera leur acceptation. Car en définitive, toute politique fiscale, aussi bien intentionnée soit-elle, ne peut prospérer sans l’adhésion des citoyens qu’elle concerne.
NB : Toute reproduction, intégrale ou partielle, sans une autorisation explicite de notre part est strictement interdite. Cette action constitue une violation de nos droits d’auteur, et nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour faire respecter ces droits.
Moise Touré
Source: Bamada.net
Source: bamada