Dans un discours remarqué, Choguel Kokalla Maïga, Premier ministre de la transition, a exprimé publiquement son mécontentement vis-à-vis de sa marginalisation dans les prises de décisions majeures du pays. Ses critiques, émises lors d’une cérémonie à Kidal marquant le premier anniversaire de la reprise de la ville par les Forces Armées Maliennes (FAMa), traduisent un malaise profond au sommet de l’État.
Une rupture inattendue dans l’unité de façade
Bamada.net-Choguel Maïga, figure historique du Mouvement du 5 juin – Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP), avait été un soutien clé des militaires depuis leur arrivée au pouvoir en août 2020. Cependant, ses récentes déclarations marquent une rupture. Devant ses partisans, il a dénoncé le report unilatéral de la fin de la transition, initialement prévue pour le 26 mars 2024, sans consultation au sein du gouvernement.
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« La transition ne peut réussir que si nous sommes unis et si les décisions se prennent de manière concertée », a-t-il martelé, tout en soulignant son isolement face aux grandes décisions du régime.
Le malaise de la marginalisation
Selon Choguel Maïga, les décisions clés sont souvent annoncées à la télévision, mettant les membres du gouvernement, y compris lui-même, au même niveau d’information que le grand public. Cette mise à l’écart alimente un climat de frustration. Le Premier ministre a particulièrement ciblé le ministre de l’Administration territoriale, le colonel Abdoulaye Maïga, qu’il accuse d’agir sans concertation avec le reste de l’exécutif.
Fodie Tandjigora, sociologue et universitaire, analyse cette situation comme un « isolement stratégique » orchestré par les militaires, visant à concentrer le pouvoir entre leurs mains.
Un appel à l’unité et à la résistance
Lors de son discours, le Premier ministre a évité de critiquer directement les forces armées maliennes. Il a plutôt loué leurs succès, notamment dans la sécurisation de Kidal, tout en appelant au respect des autorités civiles comme gage de stabilité politique. Choguel Maïga a également évoqué le soutien du chérif de Nioro, figure religieuse influente, dans une tentative apparente de rassembler des appuis au-delà de ses soutiens traditionnels.
« C’est une façon de montrer qu’il n’est pas seul et qu’il reste une voix politique crédible face aux défis de la transition », estime Mohamed Amara, enseignant à l’Université des lettres et des sciences humaines de Bamako.
Pourquoi reste-t-il en poste ?
Malgré les tensions, Choguel Kokalla Maïga ne semble pas prêt à démissionner. Plusieurs analystes voient dans son maintien au pouvoir une stratégie visant à préserver ses intérêts personnels ou politiques. « Il mise peut-être sur un rôle historique, espérant que les militaires concrétiseront les aspirations de changement, ou il s’agit simplement de conserver une certaine visibilité politique à ce stade de sa carrière », avance Fodie Tandjigora.
Une transition incertaine
Ces critiques interviennent dans un contexte où la transition malienne est régulièrement prolongée, alimentant frustrations et interrogations quant à son issue. Le M5-RFP, dont Choguel était une figure de proue, avait déjà exprimé son inquiétude face à la lenteur des réformes et à l’absence de calendrier clair pour un retour des civils au pouvoir.
Le discours de Choguel Maïga ouvre une nouvelle page dans les relations tendues entre civils et militaires au sommet de l’État. Reste à savoir si cette prise de position marquera un tournant ou si elle restera une note discordante dans une transition toujours plus incertaine.
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Fatoumata Bintou Y
Source: Bamada.net
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